Philippe FISSORE, le peintre de la douceur en couleurs.
Texte de Catherine Faure.
Comment mettre des mots sur l’œuvre de Philippe Fissore sans
parler de soi quand l’artiste se met à nu, sans se dévêtir pudiquement quand l’artiste enveloppe le contemplateur
d’un trait si sensuel? Edward Hopper me susurre que "Si on pouvait le dire avec des mots, il n'y aurait aucune
raison de le peindre", il détient sans aucun doute une des nuances de la palette oxymorique de Philippe.
Je poursuis pourtant mon questionnement tout en pressentant que si les traits du Maître de la douceur en couleurs m’emmènent
lentement sur les lignes courbes du pourquoi, il n’y aura pas de parce que…
Les tableaux de Philippe me parlent de moi tout en me conduisant à l’oubli de moi-même, ses femmes portent parfois des
masques et font tomber les miens, il m’ouvre sur mon paysage intérieur…je crois comprendre puis le sens m’échappe.
Je m’assois, pour faire une pause dans un monde qui va trop vite, entourée de son œuvre prolifique, je me coupe du monde
pour mieux me retrouver. Je me laisse happer par le mouvement de son pinceau, je suis dans le tableau, ravie au sens littéral.
Je suis la femme sphinge qui dandine ses leurres sans malice aucune, qui les offre aux spectateurs car dans l’acte de donner,
il y a toujours celui de recevoir. Je suis Danaé, je suis Odalisque, je suis chat, je suis comédienne, je suis mère, amante,
maîtresse conquise qui n’offre plus l’intérêt des jeux de l’amour et de la séduction. J’abdique, puis,
je refais mon apparition, lorsqu’on m’attend le moins, pour murmurer aux amoureux d’Art que je n’ai pas
livré tous mes joyaux cachés et que je peux encore leur en conter. Je deviens femme, pur corps, pur esprit. Je deviens la peinture
du peintre, protéiforme, cercle et cube à la fois. Je deviens femme paysage, déconstruite pas le kaléidoscope de la subjectivité de
l’artiste et réunifiée par ses retouches multiples, toutes mes facettes ont été adoucies par son pinceau amoureux. Je vous
offre mes formes, dévoile mon mont Vénus, mes seins sont les sommets bombés des montagnes émoussées, des volcans convexes, je pars
en voyage, mais je reviens toujours, je suis le cercle de l’Eternel Retour, j’oublie le temps qui devient rond et
l’espace qui devient courbe. Mais je suis aussi pied, celui qui m’élève et m’ancre dans la réalité. Je suis le
regard poignant de l’Elégante, incomprise puis rassurée car l’œil du peintre a bien capté le contraste entre ma
réserve et ma séduction. Je me reconnais à travers lui : il m’a révélé une partie de moi que j’ignorais.
J’ai l’étrange sentiment d’avoir assis ma solitude à côté de celle du peintre qui a patiemment rassemblé mon être
éclaté. Je me sens apaisée, singulière et universelle, une femme qui a un corps, une femme qui pense aussi.
La peinture de Philippe Fissore parle des femmes…aux Hommes, elle est une médiatrice, elle m’offre « quelque chose de
simple, quelque chose de beau, quelque chose d’utile » comme l’écrit si bien Prévert…, elle répond à mes rêves.
La boucle est bouclée, la peinture de Philippe ne s’explique pas, elle se ressent, elle se rêve…